Le 12 octobre dernier, la Métropole de Toulouse a validé lors d’une séance du Conseil Métropolitain son rapport annuel sur les déchets pour l’année 2022. Ce document, dont la publication annuelle est obligatoire dans les collectivités en charge de la collecte des déchets, est une source précieuse d’informations sur la gestion des déchets des toulousain·es par les services de la Métropole.
Combien de déchets sont produits ?
Chaque Toulousain·e a produit, en 2022, 421 kg de déchets ménagers. Sur ce total, 80 kg ont été amenés en déchèterie, 99 kg ont été triés par les habitant·e·s puis collectés séparément (emballages+papiers, verre, encombrants, déchets végétaux, textiles) et il restait 241 kg d’Ordures Ménagères Résiduelles (OMR, c’est-à-dire la poubelle grise) qui correspond à tout ce qui n’est pas trié et qui est envoyé à l’incinérateur. Cela représente un sac de 30L de déchets jeté toutes les semaines par chaque Toulousain dans la poubelle grise.
Comparaison nationale et autres métropoles
La production de déchets par habitant·e sur Toulouse est inférieure à la moyenne nationale pour l’année 2021, en effet celle-ci était de 615 kg/hab./an cette année-là en France. Mais la production de déchets par habitant·e est en réalité plus faible dans les grandes villes qu’à la campagne, principalement à cause du nombre de personnes habitant en appartement et qui produisent moins de déchets verts (forcément !) et de gravats et déblais. Or ces deux catégories sont parmi les quantités de déchets les plus importantes emmenées en déchèterie. Il est donc plus pertinent de comparer la production de déchets sur Toulouse à celle des grandes agglomérations de typologie urbaine dense. On voit dans ce cas que l’écart sur les DMA est plus faible (484 kg/hab./an pour 421 kg/hab./an pour Toulouse), par contre l’écart sur les OMR est plus élevé (268 kg/hab./an au lieu de 241 kg/hab./an en moyenne sur Toulouse).
Une production par habitant·e en baisse
La production de déchets par habitant·e était globalement stable autour de 470 kg/hab./an entre 2010 et 2018 et est en baisse constante depuis. Cette décroissance s’est également poursuivie l’année dernière quasiment pour chaque catégorie de déchets. La production d’OMR a baissé de 5 kg/hab./an entre 2021 et 2022, ce qui correspond à la diminution moyenne sur les 12 dernières années. La production de DMA, elle, a diminué de 23 kg/hab./an, soit -5%, la plus forte baisse annuelle depuis 2010.
Plusieurs raisons permettent d’expliquer cette baisse :
- La forte sècheresse en 2022 qui a limité la production de déchets verts et donc les apports en déchèterie
- La limitation d’accès aux professionnel·les en déchèterie pour les gravats et le bois
- L’amélioration de l’accompagnement au tri des déchets incinérables en déchèterie
- L’arrêt de la collecte de certains gros producteurs (produisant plus de 10 m3 par semaine)
- La poursuite des actions de sensibilisation et d’accompagnement à la réduction des déchets : opération « C’est décidé je réduis mes déchets », distribution de composteurs, installation de sites de compostage partagé, …
Il convient de remarquer que cette dynamique à la baisse de la production de déchets n’est pas propre à Toulouse puisqu’elle est partagée par de nombreuses collectivités en France et devrait se retrouver dans les moyennes nationales lorsqu’elles seront disponibles. Ainsi il est possible de rattacher cette diminution, au moins en partie, à la conjoncture économique nationale. De plus, il est important de noter que toutes les actions mentionnées n’impliquent pas nécessairement une diminution de la production de déchets mais plutôt un arrêt de leur prise en charge par le service public, c’est le cas en particulier de tout ce qui concerne les déchets des professionnel·les.
Cette diminution permet de remettre la Métropole sur sa trajectoire règlementaire de réduction des déchets. En effet la loi AGEC lui impose de réduire de 15 % sa production de déchets ménagers et assimilés par habitant·e entre 2010 et 2030, ce qu’elle n’avait jamais respecté jusqu’à présent. Or la diminution observée en 2022 lui permet pour la première fois de passer sous cette trajectoire, ce qui semblait encore impossible en 2018. En effet, cette année-là la production de déchets était de 470 kg/hab./an, soit quasiment identique à 2010, la baisse est donc en réalité de -11 % en 4 ans, entre 2018 et 2022.
Mais une production globale de déchets toujours importante
Cependant, cette diminution de la production de déchets par habitant·e n’est pas suffisante pour compenser l’augmentation de la population sur la métropole de Toulouse, + 164 000 habitants entre 2010 et 2022, soit + 25%. Ainsi la quantité globale de déchets ménagers et assimilés est bien, elle, en augmentation, de + 11% depuis 2010. Les ordures ménagères résiduelles sont, elles, à un niveau quasiment stable sur les 12 dernières années.
Taux de valorisation
Le taux de valorisation matière est la part des déchets produits qui sont recyclés, compostés ou réemployés, en opposition aux autres déchets qui sont éliminés, c’est-à-dire incinérés ou enfouis. La loi AGEC impose un minimum de 55 % de taux de valorisation matière en 2020 et de 65 % en 2025. C’est-à-dire que, parmi la totalité des déchets produits par les Toulousain·es en 2022, au moins 55 % auraient dû être recyclés, compostés ou réemployés, et donc un maximum de 45 % auraient dû être incinérés ou enfouis. Or, d’après le rapport annuel sur les déchets de Toulouse, son taux de valorisation matière était de seulement 44 % en 2022. Et encore la Métropole inclut dans ce décompte les mâchefers issus de l’incinération des Ordures Ménagères Résiduelles, sous prétexte qu’ils sont utilisés en sous-couche routière. Or, comme le rappelle un article de l’association de collectivités AMORCE, « l’utilisation des mâchefers en technique routière n’est pas considérée comme du recyclage pour l’Europe » (1). La plupart des collectivités françaises appliquent maintenant cette méthode de calcul, sauf…Toulouse, qui est la seule parmi toutes les métropoles françaises à continuer à inclure les mâchefers dans le calcul de son taux de valorisation matière.
Ainsi, sans les mâchefers, le taux de valorisation matière de Toulouse en 2022 est en réalité de 36 %, encore plus éloigné de son objectif règlementaire de 55 % en 2020 ou 65 % en 2025.
Coût de la gestion des déchets
Le total des coûts de gestion des déchets était de 115 millions d’euros en 2022, en augmentation de 7 % par rapport à 2021. Si l’on déduit les 9 millions d’euros d’aides et de produits perçus par la métropole, le coût aidé, c’est-à-dire le coût restant à financer par la Taxe d’Enlèvement des Ordures Ménagères (TEOM) était de 105 millions d’euros, soit 127 € par habitant·e.
Après avoir longtemps stagné autour des 700 000 €, le montant alloué à la prévention des déchets est en augmentation depuis 2 ans, il a doublé sur la période pour atteindre 1.4 millions d’euros. Il faut toutefois relativiser ce chiffre, qui ne représente toujours que 1.3 % du budget déchets, alors que dans le même temps plus de 19 % du budget déchets est alloué uniquement à l’incinération des déchets.
Nous tenons quand même à signaler cette bonne dynamique, qui devra impérativement être prolongée et même amplifiée si nous voulons vraiment rattraper notre retard sur des métropoles comme Rennes ou Grenoble qui dépensent plus de 2% de leur budget déchets à la prévention depuis plus de 10 ans.